Patrice Alexandre vit entre la Champagne et Paris. Il étudie à l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux Arts de Paris de 1968 à 1973. Pensionnaire à l’Académie de France à Rome, il obtient le Prix de la Biennale de sculpture de Budapest en 1981.
Entre 2001-2011, il effectue un travail de réflexion et d’interprétation sur les monuments à la Grande Guerre.
Gueules de la terre
Les « Gueules de la terre » sont des représentations commémoratives des « gueules cassées » de la première guerre mondiale. « L’expression « gueules cassées » inventée par le Colonel Picot premier président de l’Union des Blessés de la Face et de la Tête, désigne les survivants de la Première Guerre mondiale ayant subi une ou plusieurs blessures au combat et affectés par des séquelles physiques graves, notamment au niveau du visage. Elle fait référence également à des hommes profondément marqués psychologiquement par le conflit, qui ne purent regagner complètement une vie civile ou qui durent, pour les cas les plus graves, être internés à vie. » Wikipedia. Les soldats de la première guerre mondiale ont creusé des tranchées, s’enfonçant dans la terre tandis que le sculpteur, comme dans un mouvement inverse, a fait surgir de cette même terre ces visages pétrifiés. « Face à une guerre où le corps s’est employé faute de mieux à vivre à plat ventre, et en creusant des tranchées, la commémoration et le vécu des poilus ne font pas bon ménage.
Les soldats ont creusé, les sculpteurs ont élevé ; un socle les sépare. » Patrice Alexandre, notes d’atelier
L’artiste déforme les visages en incrustant une chambre à air par exemple dans la terre, ce qui donne un effet dramatique aux sculptures. Les têtes semblent être fossilisées dans la boue des tranchées, comme figées dans un dernier souffle de vie. L’artiste dénonce la guerre et ses atrocités avec ses oeuvres tragiques. Celles-ci sont expressives et font penser aux dessins et peintures d’Otto Dix, peintre qui a fait la guerre de 14-18 et qui en a rapporté des images témoignant des atrocités qu’il a pu voir au combat. Ci-dessous: Les joueurs de cartes
Sur le thème des gueules cassées, peu connu du XXème siècle, René Apallec a réalisé des collages qu’il a tenus secrets pour des raisons politiques. En effet, René Apallec jugeait ses oeuvres comme étant dérangeantes.
Il froisse, déchire, lacère le papier, utilise le relief pour exprimer la souffrance de ces soldats mutilés de la guerre. Fût-il infirmier durant la première guerre mondiale ? Ses travaux furent retrouvés en 2007 dans des cartons oubliés durant tout ce temps. Il agit comme un chirurgien plastique sur le visage de ses portraits.
Qu’en est-il aujourd’hui ?
L’artiste peintre Benoît Cousin nous offre des peintures représentant des gueules cassée jaillissant sous des larges et vives touches de peinture. Les couleurs sont crues et sombres, il joue avec les contrastes pour montrer la violence de ces blessures défigurant les visages.
Dans l’art contemporain, Francis Bacon défigure son visage de manière tortueuse et la souffrance qui émane de ses autoportraits fait penser à celles des gueules cassées.
Dans le même esprit l’artiste Cédric Ponti a fait un travail avec les lycéens du Parc St Jean à Toulon et le FRAC PACA, autour des gueules cassées en modelant des visages en terre crue et en y insérant des pétards qui en explosant déformaient les visages, le résultat était vraiment très fort.
Merci, je regarde !