Le stade des opérations formelles nécessaire pour enseigner par expérimentation.

Regardant de près les programmes dans le précédent article à travers le prisme de l’exploration et du réinvestissement, je me suis posée la question suivante: quel est le meilleur moyen pour nos élèves de concevoir un dispositif en arts plastiques compte-tenu de leur développement psychomoteur et qui soit au plus près de leurs attentes ?

Les élèves d’ailleurs sont-ils les mêmes avec un développement identique ?

Pour commencer, je vais longuement citer Piaget où je suis allée prendre des éléments de définition sur plusieurs sites dont son site officiel:

opération concrète

« Une opération est une action matérielle intériorisée au niveau de la représentation mentale. Si l’enfant de niveau sensori-moteur est capable d’actions (emboîter empiriquement, c’est-à-dire par tâtonnements, par essai-erreur, des plots par ordre décroissant de taille ; ajouter un ensemble d’objets à un autre tas), l’enfant de niveau opératoire est capable des mêmes organisations d’objets, et pas du seul point de vue des actions, mais aussi de la représentation (l’action d’ordonner des objets par ordre décroissant de taille sera précédé de la représentation mentale permettant une réalisation, non plus par essai-erreur, mais en choisissant précisément le premier objet à prendre, puis le deuxième, et le troisième… ou encore effectuer une addition mathématique A + B). » (6)

« Elaborées en moyenne entre six et dix ans environ, les opérations concrètes constituent l’une des deux grandes familles d’opérations mises en évidence par Piaget et ses collaborateurs dans leurs recherches sur le développement de l’intelligence représentative chez l’enfant et l’adolescent (l’autre étant composée des opérations formelles). Les opérations concrètes constituent l’ensemble des activités opératoires (classer, sérier, dénombrer, décomposer, composer, etc.) par lesquelles le sujet organise, transforme et conçoit les objets réels (et non pas propositionnels). » ©Piaget

  • Disponibilité pour les apprentissages pédagogiques
  • L’âge de raison
  • Dissociation du réel et de l’imaginaiire
  • Acquisition de l’esprit critique
  • Développement de mémoires
  • L’enfant peut saisir les données invariables : (la mort, notion de propriété, conscience du vol, mensonge, vérité).
  • « La fonction symbolique (ou sémiotique) est conçue « en tant que mécanisme commun aux différents systèmes de représentations, et en tant que mécanisme individuel « 
  • « Vers 6/7 ans, c’est le stade opératoire concret ; l’enfant a la capacité de faire une action en pensée(cf. les problèmes de maths à résoudre : » J’ai 3 billes ; j’en gagne 4 ; combien j’en aurai… ».)
    C’est la période des jeux de règles, et des jeux d’assemblage, même si ces derniers se retrouvent à tous les stades ; prenons l ‘exemple des kapplas :au stade sensorimoteur, le bébé verse, mâche, jette / au stade opératoire l’enfant construit une route ou un mur / au stade formel, il lit un plan et reproduit le modèle… » (3)

opération formelle

« Nous nommerons opérations les actions intériorisées ou intériorisables, réversibles et coordonnées en structures totales » (Etudes d’épistémologie génétique, volume 2, p. 45).
« Les opérations formelles…constituent exclusivement la structure de l’équilibre final vers lequel tendent les opérations concrètes lorsqu’elles se réfléchissent en systèmes plus généraux combinant entre elles les propositions qui les expriment » (La psychologie de l’intelligence, p. 179). ©Piaget

« A 10/12 ans, c’est le stade des opérations formelles : l’enfant est capable de faire des hypothèses et des déductions : anticipation / hypothèses / déduction. Tout ceci est le fruit de la maturité cognitive. » (3)

Du point de vue de la psychologie génétique de Piaget, les opérations formelles ne sont rien d’autre que des opérations sur des opérations concrètes. Ces dernières revenant à classer, à sérier, à dénombrer, à décomposer, etc., les objets de la réalité concrète, les opérations formelles sont alors essentiellement des opérations par lesquelles les sujets classent ou ordonnent les opérations concrètes (avec leur résultat), en faisant du même coup se réunir au sein d’un groupe d’opérations les deux formes de réversibilité de la pensée concrète (à savoir l’annulation, soit par inversion soit par réciprocité, de l’effet d’une opération). La période des opérations formelles (de 10 à 16 ans). » ©Piaget

« Ce n’est que dans ce troisième stade que l’enfant devient capable d’envisager l’exécution sur les objets de véritables opérations mentales, mais ces opérations, comme c’était déjà le cas des actions au cours du stade sensorimoteur, ne peuvent encore être faites que sur des objets visibles, présents dans la réalité qui l’entoure ou, à tout le moins, qui existent dans son champ de conscience immédiat. » (4) Il se montre ainsi capable de réaliser des classifications d’objets selon un puis même plusieurs critères, de sérier des objets le long d’une dimension, d’effectuer des raisonnements transitifs sur des objets qu’on lui présente ou qu’il rencontre.

Cette période est caractérisée par 5 éléments : le passage du concret à l’abstrait, le passage du réel au possible, la prévision des conséquences à long terme, la logique déductive et la résolution systématique des problèmes. Cette période est celle de l’adolescence. Vers 11-12 ans et jusqu’à 16 ans l’individu va mettre en place les schèmes définitifs qu’il utilisera tout au long de sa vie. Alors que l’enfant, jusqu’alors, ne pouvait raisonner que sur du concret, l’adolescent peut maintenant établir des hypothèses détachées du monde sensible. »Wikipedia

 

Tous les élèves de collège sont-ils au stade des opérations formelles indispensables structurellement pour élaborer des hypothèses dans le cadre de nos enseignements basés sur l’expérimentation ?

Si on dit à l’enfant « Il y a un chat à six pattes dans une cour. S’il y a 8 chats à 6 pattes dans une cour, combien y aura-t-il de pattes en tout ?. L’enfant qui n’a pas atteint la maturité nécessaire refusera de comprendre le problème : un chat n’a pas six pattes.

La réalité empirique ou réelle nous amène à refuser l’hypothèse de ces chats à 6 pattes. Mais nos opérations formelles, même si la question est abracadabrantesque, peuvent nous permettre de répondre à cette question.

La question est de savoir si l’enfant est capable d’accepter des prémisses arbitraires pour pouvoir entrer dans le problème.

« En résumé, on admet généralement que trois caractéristiques majeures distinguent la pensée formelle de celle du niveau précédent. Ce sont :

  1. le détachement du réel
  2. la possibilité de raisonner sur des hypothèses

3.la possibilité de situer le réel dans un ensemble de possibilité » (4)

Comment aider les élèves à accéder plus rapidement au stade des opérations formelles ?

Pour déduire avec rigueur il faut :

  1. procéder en conditions idéales, telles que l’expérience immédiate ne peut les réaliser pour arriver à des lois qui ne se vérifieront peut-être jamais mais qui resteront des constructions de l’esprit.
  2. procéder sur des objets idéaux, c’est à dire définis distinctement et d’une manière qui empêche de les confondre avec les objets variables que présente l’observation.

La condition générale et nécessaire pour aboutir à des lois générales est une déduction qui sera d’autant plus rigoureuse qu’elle sera plus formelle. »(1)

Les opérations formelles sont indispensables dans toute construction ou réflexion sur la nature.

Sommes-nous certains que nos collégiens sont tous parvenus dès la sixième au stade des opérations formelles qui peut s’étendre jusque vers les 16 ans ? Cette évolution de l’intelligence conceptuelle doit-elle être prise comme un acquis, un état de fait réel et accompli chez nos élèves ?

Le fait est que l’étude du stade de l’opération formelle reste encore peu étudié. « Les études sur l’acquisition des schèmes formels montrent que rarement plus de 50% des jeunes adultes et adultes atteignent ce stade, ce niveau opératoire formel ».(2)  »

Comment nous, enseignants d’arts plastiques pouvons-nous arriver à faire entrer les pré-ados et adolescents dans des situations d’apprentissages basées sur l’expérimentation sans être sûrs qu’ils ont bien passé ce stade dans le développement de leur pensée ? Comment en 55 minutes par semaine y parvenir ? Comment les y pousser ?

L’exploration semble davantage ancrée dans la réalité qui les entoure et la voie royale pour les amener à entrer progressivement au stade des opérations formelles. Mais là encore, on peut se poser la question du milieu où baigne l’enfant. Le contexte dans lequel il vit n’est-il pas d’une grande importance ? Enseigner les arts plastiques à Paris, avec ses musées, ses expos, ses galeries, ses monuments favorisent ce bain culturel dans lequel l’enfant est plongé.

Les méthodes d’apprentissage:

Il y a deux grandes méthodes:

  • celles qui mettent plutôt l’accent sur l’organisation de l’apprentissage par le sujet lui-même (non empirique)
  • celles qui mettent l’accent sur des paramètres extérieurs par exemple l’expérimentateur (empiriques).
  • Il y a trois méthodes sur l’organisation de l’apprentissage mais celle qui nous intéresse est celle-ci:
  • – la méthode par introduction de conflit qui permet à l’élève de ressentir une insuffisance dans ses schèmes d’assimilation en les rendant contradictoires. L’élève ainsi déstabilisé est poussé pour se construire de nouveaux schèmes de pensées pour dépasser ces contradictions en coordonnant ses instruments de connaissance. Le conflit cognitif peut intervenir soit du du dispositif soit de l’interaction entre les pairs.
  • La seconde relation vise à permettre à l’élève de se construire des questions afin de progresser dans ses apprentissages cognitifs.
  • – Enfin la méthode d’activité libre consiste à proposer un problème sans lui fournir ni indication, ni explication c’est à dire sans aucun retour. Il doit inventer des moyens pour trouver la/les solutions.
  • – La méthode cognitive forcée consiste à donner des solutions, à fournir la solution au problème.
  • Au contraire la méthode didactique consiste à donner les moyens à l’expérimentateur de trouver les solutions. Persée 2005
  • L’évaluation par compétences est une bonne chose, nous dégageant de la note. Mais comment gérer de manière juste l’appréciation du développement psychomoteur chez l’enfant ? Sera-t-il capable de comprendre ce qu’il n’a pas atteint puisque cela touche à son développement interne ? Le stade des opérations concrètes encore bien présentes au collège me laisse penser que l’exploration est davantage appropriée pour le développement de nos séquences avec un réinvestissement qui sera de l’ordre de l’expérimentation permettant ainsi aux enfants ayant atteint le niveau formel de développer leurs potentiels, entraînant avec eux le reste des élèves.
  • « Quand l’adolescent a acquis les opérations formelles au niveau intellectuel : il n’y a plus de différence en terme de raisonnement entre l’adolescent et l’adulte.
    – Le raisonnement hypothético-déductif est le même que l’adulte
    – Ce n’est plus que l’accumulation de connaissances pour l’adolescent
    Il y a une augmentation quantitative mais pas qualitative des connaissances. Le développement se termine à la fin de la vie. » (5)
  • Mes remerciements à La Fondation Piaget qui m’a autorisée à citer de larges extraits de leur site.
  • Je vous recommande de vous informer à la source : sur le site de la Fondation PIaget.

(1) http://www.fondationjeanpiaget.ch/fjp/site/textes/VE/JP24_JugEtRais_chap2.pdf

(2) « Apprentissages des opérations formelles : une recension des recherches  » S.Larivée, F. Longeot, S. Normandeau

(3) https://lesvendredisintellos.com/2013/04/06/conference-sur-le-jeu-laissez-les-jouer/

(4) http://www.loire-atlantique.gouv.fr/content/download/11841/65789/file/Le

(5) http://forum.reunion.free.fr/Psychopedagogie_parmentier_cours_1.htm

(6) http://beatriceprost.free.fr/diachronie.htm

 

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