L’inconscient disciplinaire, étude

L’inconscient disciplinaire ou les conseils de discipline .

Article en cours d’étude …

L’inconscient disciplinaire est la part d’insu que nous véhiculons plus ou moins consciemment à nos élèves. Plus cette part opaque, comme disait Bourdieu, sera mise en lumière, plus nous pourrons exercer sereinement notre métier. La conception que nous avons de notre discipline passe par une obligation: celle de maîtriser les définitions de l’art, de la question du Beau à travers les âges jusqu’à nos jours. Moins cette conscience historique est grande, plus les zones de flou seront béantes à la fois pour l’enseignant mais aussi pour les élèves, jusque dans les systèmes d’évaluation des productions. Il y a aussi cette nécessité de se poser la question pourquoi les programmes ont-ils pris cette direction et abandonné depuis longtemps l’apprentissage du dessin, de la peinture, de la sculpture, des Beaux-Arts de manière académique. L’inconscient disciplinaire fait mal pour ceux qui veulent l’entendre car il révèle nos lacunes à la fois dans nos savoirs savants mais aussi dans nos savoirs-être.

« Leibniz, philosophe allemand du XVIIe siècle, a introduit le premier le concept d’inconscient. Il désigne par ce mot les « petites perceptions », trop ténues pour être conscientes, mais qui peuvent produire une impression consciente si elles sont en grand nombre : car la conscience les agrège et les additionne, si bien que toute perception consciente est en réalité constituée d’une myriade de perceptions inconscientes. » (1) L’inconscient n’est pas issu d’une logique par exemple sous-jacente de la pensée: c’est un ensemble de contenus qui parfois émergent dans la conscience en la rendant plus opaque. Il peut s’immiscier également dans les mécanismes de notre pensée. Mais cette opacité fait sens dans la conscience, un sens qui parfois est de l’ordre de l’écart dans les mécanismes de la pensée.

Mais avoir conscience de ses propres limites peut être extrêmement libératoire voire jubilatoire et réussir à mettre au net nos zones troubles.

Pour évoquer cet « inconscient disciplinaire » de manière plus tangible, j’ai proposé aux enseignants des premier et second degré de répondre à un questionnaire.

Ces questions ont pour effet de pointer ces « zones opaques » dans nos cours et de voir ce qui peut apparaître trouble dans notre discipline.

Il y a des incertitudes relevées comme les connaissances scientifiques, les courants et les artistes. En effet, nous n’avons pas de manuel avec des œuvres choisies qui baliseraient le champ de nos références. Celles-ci sont choisies par l’enseignant : mais de quelle manière ? « faire partager des oeuvres que nous apprécions particulièrement » est un vrai problème dans notre discipline. De manière inconsciente le professeur induit des choix qui lui sont personnels. Or, nous ne sommes pas là pour faire apprécier ce que nous aimons aux élèves mais pour leur montrer différentes façons plastiques pour répondre à une question. Il ne s’agit pas de trouver des œuvres qui nous plaisent mais d’en choisir qui seront à la portée des élèves. De manière inconsciente n’est-ce pas une volonté de leur inculquer le bon goût ? A la question : Y a-t-il de l’implicite dans nos enseignements ? On peut lire cette réponse : « un moyen de faire ouvrir les yeux des élèves sur l’expression artistique ». « Non c’est un moment d’expression, où on parle avec son coeur et avec son esprit, chacun à sa manière. On y révèle notre plus belle part d’humanité, cela ne peut pas être douloureux, pour personne. » L’art n’est-il qu’expression ? Et que recouvrent les enseignants derrière ce mot un peu fourre-tout ? « comment l’artiste s’exprime pour manifester son opinion autrement que par la voix)… et la relation avec aujourd’hui… » L’art n’est-il que manifestation d’opinions ? Ces réponses n’impliquent-elles finalement pas que l’art ne peut avoir une portée universelle voire conceptuelle ? Peut-on dire que Marcel Duchamp s’exprime dans ses œuvres ? Ne sont-elles pas plutôt de l’ordre de la déclaration ? A la question sur l’implicite, un collègue répond « Honnêtement, je pense que oui, même si tout est mis en œuvre pour l’éviter. Nous restons des êtres humains… » « C’est bien parce qu’il y a de l’implicite dans notre matière, que j »aime cette discipline ! » N’est-ce pas ouvrir une brèche permettant ainsi d’accepter le flou artistique dans notre didactique ? Ne devons-nous pas faire en sorte qu’il y ait le moins possible d’implicite dans nos dires et faire devant les élèves ?

Autre point important qui est la bête noire d’un nombre conséquent d’enseignants : « Quelles sont les situations qui vous génèrent du stress ? ». Les réponses données sont les suivantes : « la confrontation, la mise en commun des productions ». Plus loin dans la question « Peut-on mettre 20/20 à une production ? Pourquoi selon vous ? » on peut lire : « la note ne se porterait pas sur la production même (le résultat) mais sur l’engagement, sur l’implication de l’élève et son attitude face aux oeuvres d’autrui, sur sa réflexion face à la consigne… ». On remarque que les termes « confrontation » et « face à la consigne » révèlent un sentiment pas forcément positif. Pourquoi ce rapport de force est-il présent dans notre cours qui a pour vocation essentielle le bien vivre ensemble ? Des enseignants ne mettent pas des 20/20 arguant du fait que rien ne peut être parfait. En moyenne 2/10 enseignants ne mettent pas la note maximale. Cette croyance vient de loin : du primat du Beau sur l’œuvre d’art. Mais de nombreux n’hésitent pas à donner la note maximum. La compréhension de la note par les élèves s’avère être un gros problème également, générant du stress chez les apprenants. Environ 8/10 enseignants font remonter ce fait. Mais de nombreux collègues remarquent le côté positif de l’évaluation par compétence.

Quelles sont vos incertitudes dans l’enseignement des arts plastiques ? « Que reste-t’il de notre enseignement des années plus tard ? Est-on parvenu à « ouvrir une fenêtre » dans leur tête ? Développer une appétence à l’Art ? En particulier auprès des élèves particulièrement réfractaires ? » On voit bien l’inconscient qui sous-tend cette réponse : cette croyance qu’on peut tout apporter aux élèves. C’est un fait, certains n’aimeront jamais le sport, l’art ou la musique par exemple. C’est aussi une croyance que celle que le meilleur des cours peut rivaliser (il y arrive parfois) avec le climat familial dans lequel baigne l’élève. Même si de nombreux cas arrivent à dépasser leur héritage familial, d’autres ne suivront pas cette voie là. Plus l’enseignement des arts plastiques commencera tôt, plus les préjugés tomberont.

Pouvez-vous identifier des zones d’incompréhension entre notre discipline et les élèves ?« Pour les élèves, je pense que c’est très vite très clair, par contre leurs parents sont pleins de souvenirs de leurs cours d’arts plastiques et ils viennent souvent plaquer leurs idées préconçues sur le dire de leur enfant. » « A quoi « sert » l’Art Plastique ? Question très courante ! J’y réponds par les notions de Culture, d’Histoire, de Liberté, de témoignage et de Plaisir. J’avoue ne pas toujours être entendue… » Cette question de l’utilité d’un cours d’arts plastiques est bien souvent formulée par les élèves. Nos réponses véhiculent des parts d’ombre. Que peut vouloir dire par exemple la liberté à un enfant même de 3ème ? Se représentent-ils la liberté comme nous les adultes ?

« Quelles sont vos incertitudes dans l’enseignement des arts plastiques ? » Dans mon académie, beaucoup de stages et formations sont orientés sur la danse et je trouve, même si j’en comprends bien l’intérêt qu’on glisse vers les programmes d’ EPS et qu’on y perd notre identité “plastique”. A force de s’ouvrir aux autres formes d’arts, j’ai peur d’y perdre la spécificité de la discipline. » Que représentent les arts plastiques dans l’esprit de cet enseignant ? La question mériterait d’être posée mais on voit bien que cette représentation de notre discipline peut être très différente d’un sujet à un autre. N’est-ce pas une opacité apparaissant ici ? Comment un élève pourra-t-il se faire une juste conscience de cette discipline avec de tels écarts dans les approches des formateurs ?

Quelles sont les parties du programme que vous n’aimez pas aborder ?  «  Il n’y en a pas car je trouve que leur interprétation est très libre, donc je les adapte à ce que j’ai envie de faire avec mes élèves. » Ne travaillons-nous que sous l’impulsion de nos envies ? Certes un cours sera sûrement plus percutant si l’enseignant apprécie ce qu’il enseigne. Mais n’est-ce pas s’autoriser à ne faire que ce qui nous plaît ? Et ce plaisir est-il le même chez les élèves ?

Quelles sont, selon vous, les angoisses par lesquelles passent les élèves dans un cours d’arts plastiques ? « Ils se sont parfois auto-inhibés, se disent qu’ils sont nuls car ils ont du mal à représenter (par le dessin) ce qu’ils voient. » Ici se joue le désir de l’enfant qui est parvenu au stade visuel dans son développement psychologique du dessin. Il est évident que nous ne répondrons pas aux attentes des adolescents car nous ne dispensons pas de cours de dessin académique, nous l’abordons de manière détournée. Mais, selon Luquet, de nombreux enfants abandonnent le dessin arrivé à cet âge car ils ne parviennent pas à reproduire le monde de manière hyperréaliste. « Les élèves sont avides de savoirs “académiques”, ils aimeraient apprendre à dessiner, à peindre, à sculpter. Quand je transforme ma salle en atelier d’artiste et qu’on met les mains dans la cuisine picturale avec des pigments, des oeufs, de l’huile… je les sens heureux d’apprendre très concrètement les recettes du métier de peintre. Je trouve qu’on intellectualise beaucoup. » 8/10 enseignants remarquent ce fait dans notre discipline: cet écart ne répondant pas aux désirs des pré-adolescents. Nous voyons bien que la personnalité de l’enseignant peut varier d’un professeur à un autre. Le fait d’intellectualiser peut déranger certains enseignants plus attirés vers le versant pratique de la discipline. De manière inconsciente donc, non fait avec conviction, cette facette intellectuelle risque de ne pas être bien perçue par les élèves. « Au collège, je ne comprenais pas la relation des références artistiques avec le sujet ». Inconsciemment, dans ce cas de figure, l’enseignant laisse penser aux élèves que l’art est incompréhensible. Voilà une zone opaque qui émerge dans de nombreuses réponses.

Y a-t-il de l’implicite dans nos enseignements ? « Énormément ! C’est souvent d’ailleurs la raison pour laquelle certains élèves ne comprennent pas les consignes. » La consigne est elle aussi une zone opaque entre l’enseignant et les élèves. Bien souvent, si les élèves ne comprennent pas la demande, c’est que le problème n’est pas assez bien posé. Lorsque la consigne est maîtrisée, tous les enfants la comprennent. Mais comment faire pour réduire cette part opaque ? L’enseignant peut déjà repérer si les élèves rencontrant des difficultés sont nombreux auquel cas, la consigne est peut être mal posée. Si le nombre reste très marginal, une reformulation suffira. Mais à ce propos, bien des élèves pensent que certains enseignants sont incompréhensibles et qu’ils ne savent pas quoi faire. Le problème dans notre discipline est  le manque de références partagées réussies. Mais même dans ce cas, il m’est arrivé de voir certaines de mes demandes très claires rendues opaques par mes collègues. La forme d’esprit véhicule une grande part d’inconscient dans notre discipline. Un enseignant idéal devrait avoir à la fois des qualités scientifiques et de la sensibilité.

« Mais aussi lors d’une présentation d’oeuvre, on explique l’oeuvre avec notre bagage culturel alors qu’un élève n’a pas du tout le même. » Voilà une grande part d’opacité quant aux finalités de nos cours : l’enseignant n’explique pas aux élèves les œuvres mais doit poser des questions afin de les amener à en dégager le sens. Si l’enseignant explique une peinture par exemple sans s’appuyer sur les réponses des élèves, ceux-ci vont lui demander à coup sûr « êtes-vous certain que l’artiste a voulu dire cela ? ». S’appuyer sur leur réponse évitera aux élèves de penser que l’art est accessible aux adultes, seulement à des experts qui de surcroît n’approchent peut-être pas la volonté de l’artiste. C’est également de manière inconsciente laisser croire que l’artiste a un langage qui s’avère être inaccessible.

Cet inconscient disciplinaire s’insinue dans plusieurs niveaux:

– l’inconscient subjectif:  (j’aime, je n’aime pas, etc). C’est peut-être la racine de toutes les formes d’inconscient qui vont suivre: il en est la secrète architecture. La conscience subjective se manifeste lorsque le sujet a atteint une grande lucidité sur les constituants de sa personne. C’est l’inconscient du sujet, du Moi.

  • l’inconscient fonctionnel: il regroupe toutes les représentations mentales que se font les enseignants à la fois de leur fonction mais aussi de celle de la discipline. C’est l’inconscient lié au métier.
  • l’inconscient langagier: « palpation de l’excitation intellectuelle à réaliser » est un exemple frappant d’une personne très équilibrée dans sa manière de formuler sa réponse. Les mots que nous employons montrent bien notre rapport à la discipline, aux élèves, notre manière d’enseigner. Les termes « face » et « confrontation » révèlent une certaine tension par exemple chez d’autres collègues. Pour exemple, au début de ma carrière, lors d’un conseil de classe, j’avais été impressionnée par un prof de philo qui avait adopté cette formule pour résumer les cas particuliers des élèves: « attitude favorable face au travail et en classe ». Comme si le rapport au travail était de l’ordre d’une lutte pour l’élève comme dans ses rapport à la classe. « Il y a une grande confiance entre eux et moi »: la formulation est importante ici: « il y a » maintient une zone opaque entre l’enseignant et les élèves: on se demande d’où vient cette confiance et à quoi elle est due. Ce n’est pas la même chose que de dire : les élèves ont une grande confiance en moi ou la confiance entre les élèves et moi est grande. La conscience langagière est fine lorsque la personne mesure les nuance du langage avec les connotations sous-jacentes à chaque terme. C’est l’inconscient qui pétrit les mots.

– l’inconscient postural (interprétation des textes, attitude professionnelle,aspect moral du métier, etc) Les termes « confrontation, face, contre, » déterminent une posture.  « …Ce ne sont pas les parties d’un programme que je n’aime pas aborder, mais le carcan imposé par les programmes. « . L’enseignant éprouve un malaise, une sorte d’étouffement vis à vis des programmes. Comment enseigner sereinement si les textes sont perçus comme une sorte de camisole ? Mais cet enseignant par ailleurs, dans de nombreuses questions a mentionné la notion de plaisir d’enseigner. Notre posture peut s’avérer être extrêmement paradoxale. Nous poursuivons : « Mais des collègues d’autres matières ne supportent pas l’idée d’aller au delà de…10/20…… » On voit bien que pour certains collègues, le rapport à la note relève d’une fantaisie interprétative. La posture d’un enseignant au regard de la note est révélatrice de ses rapports à ses élèves. Des enseignants qui n’utilisent pas l’intégralité du spectre de la notation (de 0 à 20) induisent une certaine conception de la discipline à leur insu. Il se pourrait également que plus les notes sont basses, plus la distance entre le prof et les élèves est grande. Cela ne veut pas dire qu’il faudrait mettre 20 à tout le monde ! L’inconscient postural touche à notre relation au métier. « Je dirais que l’enseignant d’arts plastiques est un magicien ! ».La posture c’est également la sensibilité qui renseigne sur les attitudes, les positions du corps. Nos gestes professionnels comportent également une bonne part d’inconscient. En effet, notre posture en classe porte en elle bien des indices émanant de notre inconscient. (regard, gestes, ton de la voix, expression corporelle, etc). La conscience posturale est atteinte lorsque le sujet maîtrise sa communication non verbale entre autres et qu’il sait appréhender les faits sans projeter d’interprétation subjective. C’est l’inconscient qui touche les gestes de métier, les gestes professionnels.

– l’inconscient factuel qui s’en tient au fait, qui évite de les interpréter.(préférences de pratiques, rituels, organisation de la séquence, ): « Je travaille mieux dans l’improvisation ( préparée) » : l’enseignant est suffisamment sûr de lui pour se permettre un grande marge de manoeuvre. « Je redoute les mises en commun qui génèrent du stress ». Chez ce deuxième enseignant, le rapport factuel à la parole véhicule cette angoisse chez les élèves qui percevront cette dimension opaque lors des prises de parole. « Il y a de l’implicite dans toutes les disciplines, ceci est du à la formulation que nous utilisons dans la rédaction de nos sujets, j’’ai testé les sujets de collègues d’autres disciplines et je suis bien dans l’embarras parfois, donc du coup je passe beaucoup de temps à formuler. » En effet, reprendre une séquence de quelqu’un d’autre induit forcément une interprétation de celle-ci. La conscience factuelle est celle qui permet de s’inscrire pleinement dans l’action ou dans l’observation de celles des autres (oeuvres, productions, etc). C’est l’inconscient qui touche notre perception et sens de l’observation. Il s’insinue dans nos constats.

– l’inconscient savant (connaissances scientifiques, historiques, etc) « Je redoute mon rapport aux références artistiques et leurs liens avec l’histoire que je maîtrise mal. ». La conscience savante consiste à maîtriser l’ensemble des savoirs et des connaissances et à pouvoir les restituer sans les déformer. C’est l’inconscient qui s’immisce dans nos connaissances savantes.

– l’inconscient procédural (mode opératoire, procédures) « oui, très bien, ils sont excites de découvrir les sujets, de les réaliser, ils aiment manipuler des matériaux, ils aiment créer, ils apprennent à aimer le côté enjeu de la matière, ». La conscience procédurale incarne la maîtrise de la didactique avec cette capacité à l’adapter aux profils des élèves et de la classe. C’est l’inconscient qui se glisse dans nos modes opératoires.

– l’inconscient culturel ou social (préjugés) »les autres enseignants détestent les arts plastiques, pas assez rigide pour eux » Il est clair que notre discipline peut paraître laxiste pour certains collègues. « Mais aussi lors d’une présentation d’oeuvre, on explique l’oeuvre avec notre bagage culturel alors qu’un élève n’a pas du tout le même. « : l’enseignant montre bien la rencontre des deux inconscients culturels lors d’une présentation d’oeuvres : les élèves ont aussi leur part d’inconscient ! La conscience culturelle ou sociale consiste pour le sujet à savoir reconnaître d’où il vient, mais également à identifier son « habitus » pour reprendre une notion de PIerre Bourdieu. En sociologie, un habitus désigne une manière d’être, une allure générale, une tenue, une disposition d’esprit. « Il permet à un individu de se mouvoir dans le monde social et de l’interpréter d’une manière qui d’une part lui est propre, qui d’autre part est commune aux membres des catégories sociales auxquelles il appartient. » Wikipedia « L’habitus est un ensemble de dispositions durables, acquises, qui consiste en catégories d’appréciation et de jugement et engendre des pratiques sociales ajustées aux positions sociales. Acquis au cours de la prime éducation et des premières expériences sociales, il reflète aussi la trajectoire et les expériences ultérieures : l’habitus résulte d’une incorporation progressive des structures sociales. » (3). C’est l’inconscient lié à notre éducation et au milieu dans lequel on évolue.

L’ordre de présentation, l’ampleur des différentes formes d’inconscient disciplinaires varient selon les personnes. En effet, on peut être plus ou moins en accord avec le milieu social, postural et autres.

De ce fait, notre discipline expose particulièrement l’enseignant aux critiques car cet inconscient disciplinaire relève à la fois de la personne mais aussi de son histoire, de sa culture, de son langage, de ses gestes, de son regard, des modulations de sa voix, de ses déplacements ou non. « Bergson affirme que l’inconscient est essentiellement mémoire. En effet, qu’est-ce donc que la mémoire, sinon une forme d’inconscient ? Tous les souvenirs qui se gravent dans notre esprit au fil de nos aventures restent inconscients la plupart du temps. » (1)

Enfin, par rapport à mon enquête menée auprès des enseignants, la majorité des collègues font remarquer que la richesse de notre discipline tient à l’implicite qui la caractérise. Ce point mériterait une étude plus approfondie.

« En dehors de l’inconscient psychique, on peut caractériser un inconscient « social ». Cet inconscient très vaste désigne tout ce qui, en l’homme, n’est pas conscient en tant que tel mais qui nous est révélé par les sciences humaines. Ainsi, l’homme est conscient de ses actes, mais il n’a pas toujours conscience de leur entière signification, de leur logique ou de leur fonction sociale. » Marx écrit :« ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur existence, c’est au contraire leur existence sociale qui détermine leur conscience « .

Reuter, fondateur du concept de conscience disciplinaire fait remarquer que l’absence de sens conduit à des représentations souvent inadéquates. Le but de cet article et sa volonté est de lancer une vaste question sur ce qui s’insinue malgré nous dans l’exercice de notre métier.

Je remercie chaleureusement les enseignants qui ont répondu avec gentillesse à mon questionnaire.

Les photographies sont de Marc Le Mené, photographe de l’inconscient. Les photos font partie d’une collection « The mental room ». 1995-2000 Du dessin à la photo, l’artiste compose ses clichés.

(1) Thomas Michaud, Télécommunication et science fiction, 

(2) Karl Marx, Avant-propos à la Critique de l’Economie politique, 1859.

(3) Habitus, Anne Catherine Wagner

 

 

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