La forme dans l’art

La forme dans l’art

Une épopée de l’art.

La forme dans l’art résulte d’une étude complexe car elle s’attache non seulement aux formes représentées, aux formes humaines ou géométriques mais aussi aux formes artistiques elles-mêmes qui ont connu de véritables bouleversements dans l’histoire de l’art.

Dans les arts, la forme est avec la couleur, un des concepts fondamentaux de l’expression plastique, et notamment dans le domaine de l’art abstrait, géométrique et/ou décoratif et de l’architecture. L’art cherche tantôt à recopier et magnifier les formes d’objets, de paysage ou de corps, à l’inventer (dans le domaine non-figuratif, le constructivisme), et tantôt à la déconstruire ou à en changer ou interroger le sens (cubisme, dadaïsme, etc.) En philosophie, la forme est en général opposée à la matière, ou au contenu. La Forme intelligible s’oppose au simulacre, à l’idole, eidôlon.

Nous allons passer de la forme humaine, à la forme hybride, indicielle, mais aussi aux formes fermées et ouvertes pour nous attarder sur les formes artistiques avec en fin de recherche la question de l’informe dans l’art. L’informe est-il une autre manière d’aborder la forme ? Celle-ci ne serait-elle pas omniprésente même dans sa négation ?

La forme humaine:

La représentation de la forme humaine est dès la période préhistorique idéalisée. La plupart des Vénus paléolithiques semblent être des représentations féminines conformes à un certain nombre de conventions figuratives, voire à une stylisation ou à une schématisation. Plusieurs parties du corps sont exagérément développées.

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Dans l’Egypte Antique, la forme humaine répond à des codes de représentation très stricts: Les dieux et déesses de l’Égypte antique représentent une foule considérable de plus d’un millier de puissances surnaturelles. La forme humaine est mélangée avec des corps d’animaux. La forme composite qui fusionne un corps humain avec une tête animale peut être vue comme l’iconographie la plus représentative de la conception égyptienne de la divinité. C’est là un enrichissement de l’iconographie artistique.

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Le corps est la composante la plus tangible de l’individu égyptien. Dans la pensée funéraire, le corps reste l’élément premier car de sa bonne conservation dépend le devenir post mortem du défunt. La forme humaine doit être parfaite pour permettre au défunt d’accéder au Royaume des morts. Les sources égyptiennes en matière de dessin de la figure humaine nous fournissent une grille de proportion à partir du Moyen Empire. Celle-ci ‘découpe’ la silhouette en 18 carreaux de la plante des pieds à la racine des cheveux.

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La forme chez les Egyptiens est matérialisée par un cerne continu qui enveloppe les corps et les vêtements. Les formes sont planes et relèvent davantage du dessin « colorié » que d’une représentation réaliste ou picturale du corps.

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Dans l’Antiquité grecque, la forme humaine obéit également à des règles de proportions très codifiées.

Exemple le Canon de Polyclète: celui-ci repose sur un ensemble de rapports numériques entre les différentes parties du corps : le torse et les jambes ont la même hauteur, c’est-à-dire trois fois la hauteur de la tête ; le bassin et les cuisses mesurent respectivement les deux tiers du torse et des jambes. Le Canon descend dans le détail : Galien parle de la proportion « du doigt au doigt, de tous les doigts à la main et au poignet, de ceux-là à l’avant-bras, de l’avant-bras au bras, et de tout à tout. »

Canons de Polyclète (Ve s.) et de Lysippe (IVe) - Le corps = 7 ou 8 fois la hauteur de la tête (1)

Il y a aussi un principe qui fera école dans la représentation de la forme humaine: c’ est le « chiasme » ou le « contrapposto ». Selon la tradition, c’est Polyclète qui introduit la notion de contrapposto, c’est-à-dire le fait de reposer le poids du corps, en station debout, sur une seule jambe, atténuant ainsi l’impression de raideur qui se dégage souvent de la sculpture grecque archaïque. On emploie également le terme « chiasme », qui désigne le principe d’inverser la ligne du bassin à la ligne des épaules. De ce fait si nous prolongeons ces deux lignes elles forment une croix, d’où l’emploi du terme « chiasme ». De plus le pied gauche, celui de la jambe libre, est porté à la fois en arrière et tourné avec un talon fortement soulevé. C’est ainsi que Polyclète a résolu le problème du déhanchement.

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Chez les Romains, la forme humaine répond également à des règles strictes de proportions idéalisées. La recherche d’une harmonie parfaite se traduit notamment par la mise en place du canon de Polyclète qui règle les proportions idéales du corps humain (en adéquation avec les sujets représentés : dieux, héros et athlètes). D’autre part, le goût pour l’illusion et la mise en concurrence de la représentation et de la réalité se lit dans la pratique très poussée de l’imitation (mimesis). Ci dessous Trajan représenté en Diomède

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La forme humaine au Moyen-âge est idéalisée également avec un souci graphique important. Les corps sont déformés pour exprimer l’idée, par exemple ci-dessous la danse:

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Dans l’art byzantin, la forme humaine est associée aux personnages divins. Tout est réglé par des codes de représentation bien définis. Les formes, y compris dans la mosaïque, sont délimitées par des cernes sombres. Les personnages sont statiques pour des raisons religieuses: elles s’imposent au regard.

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A la Renaissance, les peintres redécouvrent l’idéal des Anciens. Léonard de Vinci réalise son Homme de Vitruve aux proportions bien définies. L’homme de Vitruve est le nom communément donné au dessin à la plume, encre et lavis sur papier, intitulé Étude des proportions du corps humain selon Vitruve et réalisé par Léonard de Vinci aux alentours de 1492.

Le texte en italien semble illisible car Léonard l’a écrit à l’envers selon la technique de l’écriture spéculaire. Un miroir permet de décrypter le texte :

« Vitruve dit, dans son ouvrage sur l’architecture : la Nature a distribué les mesures du corps humain comme ceci:

Quatre doigts font une paume, et quatre paumes font un pied, six paumes font un coude : quatre coudes font la hauteur d’un homme. Et quatre coudes font un double pas, et vingt-quatre paumes font un homme ; et il a utilisé ces mesures dans ses constructions.

Si vous ouvrez les jambes de façon à abaisser votre hauteur d’un quatorzième, et si vous étendez vos bras de façon que le bout de vos doigts soit au niveau du sommet de votre tête, vous devez savoir que le centre de vos membres étendus sera au nombril, et que l’espace entre vos jambes sera un triangle équilatéral.

La longueur des bras étendus d’un homme est égale à sa hauteur.

Depuis la racine des cheveux jusqu’au bas du menton, il y a un dixième de la hauteur d’un homme. Depuis le bas du menton jusqu’au sommet de la tête, un huitième. Depuis le haut de la poitrine jusqu’au sommet de la tête, un sixième ; depuis le haut de la poitrine jusqu’à la racine de cheveux, un septième.

Depuis les tétons jusqu’au sommet de la tête, un quart de la hauteur de l’homme. La plus grande largeur des épaules est contenue dans le quart d’un homme. Depuis le coude jusqu’au bout de la main, un quart. Depuis le coude jusqu’à l’aisselle, un huitième.

La main complète est un dixième de l’homme. La naissance du membre viril est au milieu. Le pied est un septième de l’homme. Depuis la plante du pied jusqu’en dessous du genou, un quart de l’homme. Depuis sous le genou jusqu’au début des parties génitales, un quart de l’homme.

La distance du bas du menton au nez, et des racines des cheveux aux sourcils est la même, ainsi que l’oreille : un tiers du visage. »

— Vitruve, dans son ouvrage De l’architecture.

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La forme humaine doit également répondre aux règles de la perspective redécouverte à cette époque. Par exemple, le raccourci de Mantegna, dans son Christ Mort est remarquable.

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La forme humaine ainsi codifiée par les règles de la perspective va connaître une longue vie dans les arts qui tenteront d’imiter le réel tout en l’idéalisant.

Ingres, peintre néo-classique, dans son Odalisque va rajouter trois vertèbres dans son modèle pour amplifier le mouvement quitte à sacrifier la véracité de son oeuvre pour obéir à des canons de la beauté.

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Ces canons de la forme humaine auront un long devenir jusque dans le Modulor du Corbusier. Le Modulor est une notion architecturale inventée par Le Corbusier en 1944. Silhouette humaine standardisée servant à concevoir la structure et la taille des unités d’habitation dessinées par l’architecte, comme la Cité radieuse de Marseille, la Maison radieuse de Rezé ou l’Unité d’habitation de Firminy-Vert. Elle devait permettre, selon lui, un confort maximal dans les relations entre l’Homme et son espace vital.

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Par la suite, les artistes abandonneront les codifications de la forme humaine pour répondre à des critères plus plastiques et artistiques.

Gustav Klimt déforme les corps pour amplifier sa composition générale du tableau.

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La forme cubiste: Le système de représentation cubiste va bouleverser les codes de la représentation. Le cubisme prend sa source dans une lettre de Cézanne à Émile Bernard, du 15 avril 1904, de laquelle sera tirée une phrase souvent répétée pour justifier les théories cubistes : « Traitez la nature par le cylindre, la sphère, le cône, le tout mis en perspective, soit que chaque côté d’un objet, d’un plan, se dirige vers un point central. Dans le cubisme analytique l’objet est construit selon l’inversion de la perspective et toutes ses facettes sont représentées en fragments.

Picasso, Jeune fille à la mandoline. La représentation n’est plus illusionniste mais comme éclatée.

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Dans la sculpture, un changement est effectué par Gormley qui réussit à réaliser des formes humaines sans contours.

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Les formes hybrides:

Ce sont des formes métissées ou assemblées qui génèrent des formes nouvelles, inédites. Par exemple les divinités égyptiennes mélangeant animal et représentation humaine. Les chimères en sont un autre exemple.

Léonard de Vinci

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Fontcuberta joue sur la frontière entre réalité et fiction avec ses chimères:

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Kate Clark réalise des chimères en trois dimensions:

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Magritte représente une forme hybride dans cette peinture.

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La forme non pas représentée mais présentée:

« Le terme « présentation » est un terme propre aux Arts plastiques et recouvre trois sens principaux, il désigne :

– l’intégration du réel dans l’œuvre : la « présentation » du monde (et non plus seulement sa « représentation ») et l’affirmation de la matérialité (présence physique des supports, matériaux et techniques utilisés),

– la mise en scène (scénographie) de l’œuvre dans un espace, à destination du spectateur : la relation de l’œuvre au lieu et le rôle dévolu au spectateur, 

– la valorisation de l’œuvre : par le cadre, le piédestal, le socle, l’affiche, le cartel, le vernissage, le happening …). » artPlastoc

La forme humaine, longtemps représentée dans l’art, fait son irruption dans l’art en se présentant elle-même.

Piero Manzoni signe sur la peau des spectateurs pour en faire des oeuvres d’art.

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Gilbert et Georges

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Willi Dorner

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Dans le cas de la peinture, formes représentées et présentées cohabitent harmonieusement.

Martial Raysse, le chapeau rouge au premier plan est un véritable objet mis en scène dans la composition.

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Les formes ouvertes et  les formes fermées:

A partir des variables de contours ou frontières qui les constitutent, les formes se divisent en deux grandes catégories : les formes ouvertes et les formes fermées, marquées ou non par une ligne/contour. Toute forme dont la frontière est constituée par un élément linéaire, marqué ou non, qui, après un hyptothétique point de départ revient sur lui-même, est appelée forme fermée. Cet élément linéaire, lorsqu’il est marqué, s’appelle ligne/contour, ou par abréviation contour. La forme ouverte n’a pas de contours fermés qui la délimitent.

Forme fermée: Keith Haring, le contour enveloppe les formes et se referme sur lui-même

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Formes ouvertes: Kandinsky, Improvisation, les formes sont fermées, comme zébrant la toile. Elles ne se replient pas sur elles-mêmes sauf pour la forme qui ondule dans la partie supérieure gauche du tableau.

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Les formes artistiques:

Dans la peinture académique, la hiérarchie des genres, qui comprenait tous les genres picturaux, était la suivante :

  1. l’Histoire, genre considéré comme le plus ardu car en plus des compétences picturales intervenait la capacité à interpréter les Textes.
  2. le portrait,
  3. la scène de genre,
  4. le paysage,
  5. la nature morte.

La peinture d’Histoire: Peinture d’histoire, qui comprend la peinture religieuse et la peinture dont le sujet est tiré de la fable de l’Histoire, comme la peinture de bataille

Lebrun, Ce tableau a été peint, vraisemblablement, à la fin de l’année 1660 Alexandre dans la tente de Darius

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Le portrait: 

Rigaud, Portrait de Louis XIV

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La scène de genre:  Une scène de genre, en peinture, est un type d’œuvre peinte ou dessinée qui figure des scènes à caractère anecdotique ou familier. Elle est parfois appelée peinture de genre.

Louis Le Nain,

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Le paysage, Paysage, dans lequel les marines méritent une place supérieure en raison des connaissances techniques qu’elles exigent

Vue de Delft, Vermeer

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La nature morte: Une nature morte est un ensemble d’éléments inanimés (fruits, fleurs, vases, etc.) ou de cadavres (gibier, poissons), puis, par métonymie, une œuvre (en peinture ou en photographie, etc.) représentant une nature morte. Le terme n’apparaît qu’à la fin du xviie siècle. Jusque-là, seule l’expression « cose naturali » (choses naturelles) avait été utilisée par Giorgio Vasari pour désigner les motifs peints de Giovanni da Udine.

Le Caravage, corbeille aux fruits

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Classification populaire des arts

  • 1er: Architecture
  • 2e : Sculpture
  • 3e : Peinture
  • 4e : Danse
  • 5e : Musique
  • 6e : Littérature/poésie
  • 7e : Cinéma

Auxquels on ajoutera selon le locuteur, pour les arts récents (généralement qualifiés de « huitième » sans considération pour leur ancienneté) : la radio, le gemmail, la télévision, la bande dessinée (généralement plus spécifiquement qualifiée de neuvième art, tel que proposé par Claude Beylie en 1964 – qui accordait à la télévision la place de 8e art) ou le jeu vidéo.

Les formes artistiques chez Hegel:

Chez Hegel l’idéal de l’art est de « manifester, sous une forme sensible et adéquate, le contenu qui constitue le fond des choses » ( HEGEL, Esthétique, trad. de C. Bénard revue et complétée…)? Ce rapport d’adéquation peut naturellement être plus ou moins exact, fidèle.

D’où les trois grandes formes générales d’art :

forme symbolique lorsque la manifestation sensible est encore trop indéterminée, démesurée par rapport au contenu. (Art oriental, sublime, où la forme excède le contenu)

forme classique lorsqu’elle atteint la mesure, l’équilibre relativement à ce contenu; (« c’est la forme classique grecque, et plus particulièrement la figure humaine sculptée, qui a atteint « cet heureux accord entre la forme et le contenu »)

forme romantique lorsqu’elle est elle-même débordée, dépassée par une idée devenue trop riche pour elle. (Art chrétien, vrai, où le contenu se retire de la forme.)

Ainsi l’histoire et l’analyse de l’art se réduiraient au développement des « différents rapports entre forme et contenu » ( El 136; H 1114.), développement qui tournerait finalement, au stade romantique, à l’avantage du contenu, c’est-à-dire à l’inéluctable « mort de l’art » et à l’avènement de la religion, seule capable désormais de représenter le nouveau contenu empreint de spiritualité.

Hegel développe également un système des beaux-arts, qui se divise en cinq arts principaux suivant l’espace (architecture, sculpture, peinture) et le temps (musique, poésie).

En 1818, Hegel propose une classification des Arts, selon une double échelle :
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1er art Architecture (le plus matériel, le moins expressif)

2ème art: La sculpture

3ème art: la peinture

4ème art: la musique

5ème art: la poésie (le moins matériel, le plus expressif)

Puis en 1908, un collectif d’auteurs ajoute un 7ème art, suivi du 8ème, défini en 1941 par Roger Clausse, Hans Hartje et le Prince Rainier, ce qui nous amène, avec Morris et Pierre Vankeer en 1964, à 9 arts majeurs :

6ème art: Arts de la scène (danse, théâtre, mime

7ème art: Cinéma

8ème art; Arts médiatiques (photo, radio, télévision)

9ème art: Bande-dessinée

Quel sera le 10ème art ?

Le refus de la forme figée de l’art en catégories:

Mais l’art contemporain s’évertue à métisser les formes artistiques afin de brouiller les pistes comme s’il refusait les classifications.

Roy Lichtenstein utilise la bande-dessinée comme moyen plastique en faisant d’une vignette une peinture.

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Marcel Duchamp invente le ready-made, cet objet tout fait entrant avec fracas dans le monde de l’art.

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Calder invente une nouvelle forme de sculpture avec ses mobiles:

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L’architecture devient sculpture avec Gehry

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L’ artiste Rino Stefano Tagliafierro donne vie à des peintures célèbres du XIXème en mélangeant vidéo et informatique.

 

Les frontières entre les formes artistiques s’effacent pour donner lieu à des oeuvres hybrides et inclassables.

Les formes pures:

Les catégories cherchent aussi comme une Forme idéale répondant à des caractéristiques essentielles. C’est le cas du monochrome, degré zéro de la peinture ou que l’on peut considérer comme son essence pure.

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Ou du degré zéro de la sculpture comme semble chercher Günter Uecker

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Les formes des arts visuels et des arts plastiques:

Arts plastiques: Dans un sens commun, les arts plastiques regroupent toutes les pratiques ou activités donnant une représentation artistique, esthétique ou poétique, au travers de formes et de volumes.

Arts visuels:  On appelle arts visuels (en anglais : visual arts) les arts qui produisent des objets perçus essentiellement par l’œil. La notion englobe les arts plastiques traditionnels (les anciens beaux-arts dégagés de la notion restrictive d’esthétique, comme du « beau »), auxquels s’ajoutent les techniques nouvelles : la photographie, le cinéma, l’art vidéo et l’art numérique, mais aussi les arts appliqués et les arts décoratifs (art textile, design, marqueterie…) et l’architecture.

Une nouvelle forme indicielle: la photographie.

La photographie est un procédé à la fois mécanique et chimique permettant à la lumière et aux ombres de se matérialiser sur un support. La lumière crée des images. La photographie désigne ainsi l’image obtenue. L’étymologie de photographie vient du grec et veut dire écriture de lumière. L’invention de la photographie a été révolutionnaire dans le monde de l’art. Progressivement, les arts picturaux s’en trouveront bouleversés et de nombreux croisements vont se mettre en place avec l’Histoire de la peinture.

En 1826, dans sa maison de de Saint Loup de Varennes, le scientifique Nicéphore Niépce (1765-1833) enduit une plaque d’étain de bitume de Judée, un produit chimique qui change d’aspect si on l’expose à la lumière. Il réalise la première photographie connue au monde. Il a laissé son appareil sur un trépied pendant plusieurs dizaines d’heures pour obtenir cette image : une vue depuis la fenêtre de sa chambre. Les règles de la perspective sont validées.

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De la remarque plutôt défaitiste : « A partir d’aujourd’hui la peinture est morte » attribuée à Laroche découvrant un daguerréotype, au banal sarcastique : « Est-ce de l’art ? », les relations entre photographes et le monde de l’art ont toujours été délicates et parfois houleuses. La photographie n’est cependant pas considérée à ses débuts comme un art : Baudelaire dira ainsi que « la photographie n’est pas un art mais un procédé mécanique de reproduction et le refuge des peintres manqués ! » . Mais ensuite, peinture et photographies feront bon ménage. Dans bien des réalisations contemporaines, la photographie marque le point de départ de la genèse de l’oeuvre.

La forme indicielle:

La forme indicielle porte les marques d’une réalité se matérialisant en elle. Les empreintes de main des hommes préhistoriques en sont un exemple.

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Cette vidéo sur l’art préhistorique, nous montre que l’art de cette époque était indiciel par excellence, comme s’il était lui aussi écriture des ombres et des lumières par projection sur les parois. C’est l’ancêtre le plus éloigné de la photographie.

La photographie est une sorte d’empreinte, de moulage, dans lequel l’objectif se substitue à l’oeil humain. Entre l’objet représenté et la représentation, rien ne s’interpose qu’un autre objet. C’est une forme d’indice pris dans une portion de réalité.

John Coplans:

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Les photogrammes en sont d’autres variantes avec cependant un contact direct de l’objet sur le support photographique. Un photogramme est une image photographique obtenue sans utiliser d’appareil photographique, en plaçant des objets sur une surface photosensible (papier photo ou film) et en l’exposant ensuite directement à la lumière.

Un photogramme de William Henry Fox Talbot (vers 1860)

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La toute-puissance de la photographie face à la réalité engendrera des conséquences dans le monde de l’art. La photographie fait croire à l’existence de l’objet représenté: l’image devient l’objet lui-même. La photographie fut au départ considérée comme ne produisant pas de l’éternité mais ne faisant que révéler le réel. Elle a libéré de ce fait la peinture et la sculpture de l’obligation de la ressemblance.

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Les formes géométriques:

Nous avons vu précédemment, que la géométrie était la clé pour représenter les formes humaines. Mais elles organisent également la composition du tableau: les lignes ci-dessous sont parfois évidentes et parfois non. Les peintres se servaient de la géométrie mais avec souplesse.

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Mais avec l’art abstrait, celles-ci font leur apparition dans le monde de la peinture.

Mondrian réalise des tableaux quadrillages:

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Mais il y a aussi l’art islamique, refusant toute forme de représentation, qui excelle dans l’art géométrique.

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Dans l’architecture, l’art géométrique est présent partout, mais notamment dans l’Institut du Monde Arabe avec sa façade ouvragée de telle sorte qu’elle nous rappelle l’art islamique:

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Nous voyons bien que les formes artistiques dépendent de l’interdit ou non de figuration.

Le matériau donne la forme :

Dans le cas précis de l’architecture ou de la sculpture, l’impact du matériau dans la forme créée est non négligeable.

les bâtiments en pierre:

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Les bâtiments en structure métallique ou le vide est dessiné:

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Les matériaux composites:

Les matériaux composites libèrent les formes avec plus de flexibilité

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Les formes nouvelles dans l’art contemporain:

Avec les métamorphoses de l’art contemporain, de nouvelles formes artistiques ont vu le jour.

Le land art:

Le land art est une tendance de l’art contemporain utilisant le cadre et les matériaux de la nature (bois, terre, pierres, sable, rocher, etc.). Le plus souvent, les œuvres sont à l’extérieur, exposées aux éléments, et soumises à l’érosion naturelle ; ainsi, certaines œuvres ont disparu et il ne reste que leur souvenir photographique et des vidéos.

Spiral Jetty de Robert Smithson, photographiée en avril 2005.

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L’installation:

L’installation, en tant que concept, caractérise depuis les années 1970, une partie des productions de l’art contemporain qui se définissent par l’occupation (temporaire ou définitive) d’un espace donné (intérieur ou extérieur), par la mise en situation de différentes techniques d’expression et de représentation, ainsi que par le rapport participatif qu’elle implique avec le spectateur. N’étant pas un mouvement ou un genre artistique en soi, l’installation trouble les rapports entre œuvre et public, en brisant les limites imposées par certaines contraintes (forme, lieu, discours, etc.).

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La performance:

L’art performance ou performance artistique est un médium ou une tradition artistique interdisciplinaire qui trouve son origine dans des pratiques artistiques d’avant-garde de la première moitié du xxe siècle comme le futurisme, Dada, le surréalisme et l’école du Bauhaus.

Les artistes usèrent de la performance afin de briser les catégories et indiquer de nouvelles orientations. L’œuvre peut être présentée en solo ou en groupe, être accompagnée d’éclairages, de musique ou d’éléments visuels réalisés par l’artiste, seul ou en collaboration, et produite dans des lieux les plus divers, des galeries d’art aux musées et aux espaces « alternatifs ». La performance peut n’être exécutée qu’une fois ou réitérée, s’appuyer ou non sur un scénario, être improvisée ou avoir fait l’objet de longues répétitions.

Marina Abramovic qui se place devant un spectateur sans bouger durant un temps déterminé, impassible et ne montrant aucune émotion sauf dans ce passage ci-dessous où un amour de jeunesse s’est retrouvé face à elle.

© 2010 Scott Rudd www.scottruddphotography.com scott.rudd@gmail.com

Le happening: 

À la fin des années 1950, un happening était une performance (au sens anglais du mot : « représentation »), un événement ou une situation qui pouvait être considéré comme un art.

Utilisé pour la première fois dans la langue française en 1964, ce substantif est emprunté à l’anglais (participe présent du verbe to happen : arriver, se produire). Une traduction possible serait une « intervention artistique ».

Le happening se distingue de la simple performance par son caractère spontané et le fait qu’il exige la participation active du public. Ainsi, pour Allan Kaprow :

« Structurellement et philosophiquement, c’est la même chose » mais « la performance est en réalité un événement artistique, et il se produit devant un public » contrairement au happening qui lui n’a « pas de public. Seulement des intervenants » et qui ne comporte « pas de références à la culture artistique. Pas de références à la musique, au théâtre, à la littérature. »

Le Flashmob:

Une foule éclair (de l’expression anglaise identique flash mob), ou encore mobilisation éclair, est le rassemblement d’un groupe de personnes dans un lieu public pour y effectuer des actions convenues d’avance, avant de se disperser rapidement. Le rassemblement étant généralement organisé au moyen d’Internet, les participants ne se connaissent pas pour la plupart.

L’art vidéo:

L’art vidéo nait, en tant qu’expression artistique, au début des années 1960, de la rencontre de plasticiens, d’ingénieurs et de responsables de chaînes de télévision qui cherchent de nouvelles possibilités d’utilisation du médium vidéo. Même si des tentatives sont faites dès la fin des années 1950, la naissance officielle de cet art a été fixée à mars 1963, lorsque Nam June Paik expose, à la Galerie Parnass (Wuppertal), treize téléviseurs préparés pour la distorsion d’images.

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L’art numérique:

L’art numérique désigne un ensemble varié de catégories de création utilisant les spécificités du langage numérique. Il s’est développé comme genre artistique depuis le début des années 1960.

Un des fondateurs: Catherine Ikam et Louis Fléri: Deep Kiss

L’art biotech:

Manipulations génétiques, clonage, OGM, de nouveaux mots et de nouvelles réalités sont entrés dans notre quotidien mais aussi dans le monde de l’art.

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La principale icône a pourtant été créée par Eduardo Kac avec son projet de lapine transgénique et vert fluorescente appelée « Alba » alias GFP Bunny, précisément parce que ce projet a pu être mené à bien par des techniques transgéniques importées dans l’art. Ce rongeur rendu fluorescent grâce à un gêne de méduse était censé provoquer le débat sur le statut des animaux transgéniques, de l’objet de laboratoire au sujet social.

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L’informe dans l’art:

L’informe est une notion importante dans l’art et chez les artistes qui ont cherché à bousculer ce qui était considéré comme la normalité.

Hans Holbein cherche à maîtriser l’informe dans ses Ambassadeurs avec cette anamorphose faisant tache dans le tableau lorsque vu de manière frontale.

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Plus tard Marcel Duchamp, dans ses Stoppages étalon, fait intervenir les lois de la gravité. « Ce n’est pas un tableau. Les trois étroites bandes s’appellent 3 stoppages-étalon. Elles doivent être regardées horizontalement et non verticalement parce que chaque bande propose une ligne courbe faite d’un fil à coudre d’un mètre de long, après qu’il ait été lâché d’une hauteur de 1 mètre, sans que la distortion du fil pendant la chute soit déterminée. La forme ainsi obtenue fut fixée sur la toile au moyen de gouttes de vernis … Trois règles… reproduisent les trois formes différentes obtenues par la chute du fil et peuvent être utilisées pour tracer au crayon ces lignes sur papier. Cette expérience fut faite en 1913 pour emprisonner et conserver des formes obtenues par le hasard, par mon hasard. Du même coup, l’unité de longueur: un mètre, était changée d’une ligne droite en une ligne courbe sans perdre effectivement son identité en tant que mètre, mais en jetant néanmoins un doute pataphysique sur le concept selon lequel la droite est le plus court chemin d’un point à un autre. » « Mes trois stoppages-étalon sont donnés par trois expériences, et la forme est un peu différente pour chacune. Je garde la ligne et j’ai un mètre déformé. C’est un mètre en conserve, si vous voulez, c’est du hasard en conserve. »

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Jackson Pollock fait couler de la peinture sur sa toile. Il cherche à maîtriser l’informe.

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Hans Bellmer avec ses poupées sordides interroge l’informe du corps.

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Lucio Fontana, Concetto spaziale

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Alberto Burri Combustion plastica,

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L’informe serait-il une forme aléatoire ? La quête des artistes sur l’informe ne produit-il pas des formes malgré la volonté d’y échapper ? L’invisibilité ne serait-elle pas le négatif de la forme ?

Pour une étude sur l’invisibilité dans l’art voir ici:

http://atomic-temporary-26416781.wpcomstaging.com/2015/10/04/lart-invisible/

Pour finir:

L’art contemporain est protéiforme et riche de nouvelles expériences renouvelant la typologie de l’art. Les frontières entre les caractéristiques artistiques s’estompent. L’art pendant longtemps a réfléchi sur le monde, les corps et les choses, perfectionnant l’art de la représentation. Il semblerait que depuis le XXème siècle, l’art se soit donné comme ambition de réfléchir sur lui même afin d’en faire transpirer ses formes pures, ses formes hybrides et avec l’idée de générer des formes nouvelles. L’art contemporain est en forme !

Actuellement dans la course au 10ème art, sont en lice :
le jeu vidéo, le graphisme, la calligraphie, le modélisme, l’art culinaire/la gastronomie…

Mais la balance semble pencher : le 21ème siècle fera-t-il des Arts numériques et du jeu vidéo le 10ème art ?

Nous terminerons cet article par la célèbre phrase de Kant « Toute forme de notre connaissance, commence par les sens, passe par delà à l’entendement et s’achève dans la raison ».

Plus de thématiques abordées sur des questions variées:

http://atomic-temporary-26416781.wpcomstaging.com/les-notions-dans-les-arts-plastiques/

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